mercoledì 21 maggio 2008

“facciamo la iosa !!”

Mardi, après une matinée de cours bien remplie, je suis allée me promener avec Filomena à Alberobello, la star suprême et incontestée de tous les villages du coin. Ca n’a décidément aucun rapport de se promener avec quelqu’un qui connaît l’endroit, tous ses recoins et ses histoires. Filomena est la femme de Takis. J’ai déjà fait allusion à Takis, ce fenomeno hellénisto-italien. Sa particularité est de dire quelque chose d’incompréhensible, d’ajouter un mouvement caractéristique de moulinets des deux bras en simultané, une grimace que lui seul connaît comme si tout était parfaitement évident. Chacun interprète à sa façon et tout finit par se résoudre (je dois dire que c’est vrai, même les situations que j’aurais jugées perdues à jamais retombent sur leurs pieds). Le « genio italiano » selon Manu, même si en l’occurrence, c’est un genio mixte, il est resté bien longtemps en Grèce avant de venir « a sposarsi una calabrese » dans les Pouilles. Ils sont d’une générosité exceptionnelle et m’accueillent bien volontiers chez eux. Filomena est médecin et m’a un peu expliqué le système de remboursement des médicaments. Les médicaments de fascia A sont considérés essentiels et entièrement remboursés, enfin, on n’avance même pas l’argent. Ceux de fascia C, considérés accessoires, peuvent être déduits des impôts. Il suffit de présenter sa « tessera sanitaria » au pharmacien et si on atteint 250 euros dans l’année, on peut le signaler sur la déclaration d’impôts. De la même manière, j’ai appris que les Italiens peuvent soutenir une association humanitaire en donnant 5‰ de leur salaire : ils le précisent sur leur déclaration et c’est également déduit de leurs impots. Elle est médecin, disais-je, et connaît donc tous les habitants d’Alberobello. On s’est assises un instant pour boire un café sur la place où nous avons déjeuné plusieurs fois l’année dernière avec Vincent. Alors qu’on se battait pour savoir laquelle des deux allait inviter l’autre (et j’étais bien partie pour perdre, leur grande phrase c’est : « quand je viendrai en France tu me payeras tout, ici c’est moi ! »… ça ne peut que me rappeler Rossella à qui je n’ai pu offrir qu’un café en trois échange), un vieil homme est passé en disant : « Dottoressa, paga Dino ». Les cafés avaient déjà été payés par Dino, le commerçant d’à côté qui avait envoyé un ami en mission auprès du serveur. En fait, on n’a pas bu un café mais un « espressino », un café avec du lait monté à la vapeur (ça devrait vous rappeler quelque chose non ?). Oui, c’est comme un cappuccino, mais en plus petit… sauf que dans la plupart des cas ils sont déjà presque aussi grands que des cappuccini. Je laisse les esprits viles se défouler contre moi, il était 16h, peut-être même 17h et j’ai bu un presque cappuccino… on ne peut se fier à rien ! Filomena m’a raconté une anecdote amusante. La dernière fois qu’elle est allée voir sa fille à Milan, elle est entrée dans un bar et a demandé un espressino. (c’est trop drôle au moment même où j’écris ça, je suis sur les marches devant chez moi et ma voisine vient d’arriver en me demandant « come si chiama questa cosa ? » en indiquant l’ordinateur !!! « computer » ai-je répondu à moitié dans mon espressino, et voilà qu’elle répète péniblement le mot venu de territoires à elle parfaitement inconnus… !) La serveuse l’a regardée de travers et lui a dit qu’elle n’avait aucune idée de ce qu’était un « espressino ». Patiemment, elle lui a expliqué de quoi il s’agissait et la serveuse a répondu « un marocchino ». Le petit expresso devient donc marocain au nord ! Elle lui a servi son mini-cappuccino (ça c’est ma version à moi) et au même moment, une autre dame, probablement méridionale, a demandé à son tour un « espressino ». La serveuse a eu le culot de lui dire qu’elle n’avait aucune idée de ce qu’était un « espressino »… Ca laisse entrevoir bien des difficultés de communication… et au-delà !


A Alberobello, les toits des trulli ont de belles petites cheminées et dessus, des soldats romains en fer qui indiquent où souffle le vent et qui sont appelés « banderuole ». Les maisons sont tellement blanches que j’ai fini par demander à Filomena qui les entretient, j’avais un doute sur le fait que la municipalité puisse payer pour ça.
Elle m’a expliqué que les gens repeignent tous leur propre maison une fois par an, au printemps. On appelle ça « allattare i muri » (« allaiter » les murs). Ils utilisent simplement de la chaux et de l’eau et le résultat est assez épatant, mais éphémère !
L’église la plus grande est celle des « santi medici », les saints médecins, Cosma et Damiano qui sont les protecteurs de la ville. Deux bâtiments singuliers : le premier est une église, la chiesa Sant’Antonio conçue dans un trullo ! Le deuxième ce sont les « trulli siamesi ». On raconte que deux frères qui étaient comme les doigts de la main ont fait construire ce trullo siamois pour montrer combien ils étaient proches. Un jour, malheureusement, leur histoire est troublée par une femme dont tous deux tombent amoureux ! (ah, l’amour… !) Ils se disputent pur savoir lequel des eux aura la femme et tout cela se termine par une séparation du trullo qui est divisé en deux parties avec une entrée de chaque côté mais conserve cet aspect siamois.

Ce sont plutôt les Calabrais qui mangent des plats très très relevés mais Filomena m’a emmenée dans un des nombreux trulli souvenirs où deux amis à elle ne vendent presque que des produits à base de piment : confiture de piment, liqueur de piment, focaccia au piment… Ils sont jumelés avec Espelette et membres d’honneur de l’association des mangeurs de piments !
En se promenant, on a vu des panneaux qui indiquaient « vieni tra noi Maria » ou « vieni a casa mia » et Filomena m’a raconté que, pendant le mois de mai consacré à la Vierge, une statue de Maria voyage de maison en maison. Chaque habitant intéressé demande à avoir Maria chez lui pendant une journée et une nuit et tous les voisins viennent prier dans son salon. La propriétaire du jour nous a expliqué qu’elle était allée chercher Maria le matin dans un autre quartier et nous a invitées à venir voir son installation. Je suis sûre que cette tradition va amuser Jean !
Autre tradition amusante et perpétuée : « andare a cantare alle uova ». La veille de Pâques, les jeunes prennent de vieux fourgons ou camions, ou cars et partent tous ensemble dans la campagne. Ils s’arrêtent chez les paysans, dans leurs « masserie » et chantent une chanson en dialecte pour réclamer des œufs. Les paysans leurs donnent des œufs et eux leur jouent un peu de musique. Le lendemain, quand les chasseurs se reposent de leur longue nuit, le mamme préparent le repas de Pasqua, uniquement à base d’œufs frais !
En me ramenant à Locorotondo, Filomena m’a donné la recette de la ciambella, le plus classique des gâteaux pour petit déjeuner. 200 gramme de farine, 100 grammes de sucre, 3 œufs, un peu de lait (qb), un sachet de levure chimique, 100 grammes de beurre. Elle travaille ensemble le sucre et les œufs. Quand ça mousse, elle ajoute le beurre fondu, puis la farine, la levure et enfin le lait. Et hop, dans le moule au four.
(qb = quanto basta, autant qu’il faut, c’est l’unité de mesure préférée des Italiens !)
J’ai en trouvé une autre version, un peu plus sophistiquée, dans un livre de recettes, la ciambella di ricotta. 300 grammes de ricotta, 300 grammes de sucre, 300 grammes de farine, 2 œufs entiers, 1 sachet de levure chimique (ça porte ici le doux nom de pain des anges !), un sachet de sucre vanillé, un zest de citron, un verre de liqueur de citron. (Voici une façon d’utiliser la liqueur de citron rapportée d’Italie et qui traîne dans un coin parce qu’en France, ça ne vient à l’idée de personne d’en boire !! Il doit y en avoir chez toi Fab, qui reste de mon dernier déménagement !)
Alors, procédé : (c’est pas sorcier) mélanger tous les ingrédients, mettre dans un moule beurré et cuire à 180° environ 40 minutes. (le moule typique est celui en forme de couronne)
Voilà, le soir, mes charmantes voisines se sont battues pour savoir laquelle des deux m’apprendrait à faire les polpette alle uova. L’une des deux a insisté tellement hier que j’ai fini par accepter (je suis faible) qu’elle emporte mon linge sale pour aller le laver dieu sait où. Je l’ai étendu ce matin, ma garde-robe colorée avait un certain cachet sur les murs blancs de notre petite ruelle. J‘ai fini la journée au cinéma, Martin Scorsese m’a invitée à un concert des Rolling Stones ! C’est un petit cinéma associatif, prix d’entrée dérisoire (3 euros), ambiance familiale, et comme il se doit en Italie, entracte à la moitié du film (l’année dernière, le projectionniste qui m’avait formée pendant les vacances de février à côté de Parme m’avait expliqué que les machines sont trop petites en Italie pour supporter des bobines de la durée d’un film. Ils en font deux petites et doivent changer à mi-course).

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