La sagra delle fave, il palio di Locorotondo

Sabato sera, era la notte del palio. Evidemment, même si je sais qu’il existe des palio un peu partout, je ne peux pas m’empêcher de penser à Sienne. Tout aussi évidemment, celui-ci n’a rien à voir. Le seul point commun c’est que les zones autour de Locorotondo s’appellent des contrade. Ce ne sont pas des quartiers de la ville mais bien la campagne environnante divisée en plusieurs territoires.
La sagra avait lieu dans une ancienne masseria (ferme) transformée en discothèque. On passe un grand portail, Anna se gare dans un champ et nous finissons à pied. Quelques trulli nous accueillent à l’entrée d’un grand terrain où, dans plusieurs petites cabanes, des gens s’agitent en costume local. Un grand jeune homme nous explique le principe de ce palio locorotondese. On fait le tour des stands pour choisir notre préféré, on achète une assiette (on l’achète vraiment, d’ailleurs, on part avec), on la tend à l’un des cuisiniers et il nous remplit notre assiette de… fèves.
Austin, un américain qui nous accompagnait, a posé son dévolu sur un petit baraquement où il a repéré plus de légumes et nous y entraîne. Austin parle peu mai on a spontanément envie de lui faire plaisir. C’est un retraité qui habitait à Los Angeles. Un étrange voyage organisé l’a conduit par le plus grand des hasards à Locorotondo, comme quoi, le hasard est parfois bien intentionné. Il est tombé amoureux de la ville et il est venu s’installer ici. Il travaille comme volontaire au collège de Locorotondo et parle italien à peu près comme je parle wolof. Je n’ai pas réussi à comprendre quel était son métier et lui n’a pas compris pourquoi j’étais ici.
Alors, ces fèves ? Non vado proprio pazza per le fave come sanno quelli che mi conoscono ma fu molto divertente. En apéritif, des fèves frites, comme des chips, craquantes, salées, mais avec leur petite forme de croissant de lune. Poi, fave con le cicorie, delle fave con una verdura un po’ amara, che per me non esiste in Francia, des fèves toutes vertes et toutes fraîches cuites avec ce légume un peu amer que je n’avais jamais goûté avant. Plus qu’un légume c’est une plante sauvage qui pousse dans les champs. Ensuite de la purée de fèves, fumante et assez savoureuse, je crois que c’était le meilleur morceau pour ce qui concerne les fèves. (Oui, je suis curieuse au point d’oublier que je n’aime pas la purée) Puis des fèves cuites à la contadina sur une tranche de pain. Quelques légumes décoraient agréablement l’assiette, poivrons grillés, salade en tout genre, incontournables avec des petits oignons. Sans aucun doute, ce que j’ai préféré.
Le palio consiste donc dans cette concurrence culinaire entre les stands qui s‘arrachent les clients, grâce à des racoleurs intelligemment campés à de postes stratégiques.
Certains mangeurs poussent le vice jusqu’à acheter une assiette à plusieurs baraques pour comparer les fèves de l’un et les fèves de l’autre mais tous proposent les mêmes plats.
Alors que nous mangions tranquillement devant notre cabane d’adoption, un caméraman a fondu sur nous comme s’il venait de croiser la silhouette d’Anita Ekberg. En réalité, nous cachions sa proie. Occupé juste derrière nous à choisir à quelle sauce il mangerait ses fèves, le maire de Locorotondo exhibait sa pelata (sa tête chauve) en engloutissant un poivron grillé d’une bouchée maîtrisée. Pour que vous imaginiez la scène, ça m’a rappelé quand les hommes lézards engloutissaient les souris en les tenant par la queue dans cette série américaine dont le nom m’échappe… comment c’était déjà ? (aiuto !!!!)
Le résultat c’est qu’on a dû marcher beaucoup après pour digérer tout ça, plusieurs tours ronds de Locorotondo m’ont permis de constater que les autochtones restent dehors une bonne partie de la nuit et que les magasins ne ferment jamais. Ce qui explique pourquoi ils ouvrent si tard le soir, la sieste est incontournable.
Et puis, de 13h à 17h, « il fait trop chaud pour travailler ».